La guerre du café • CHARLIE

L’avantage de St-Cley c’est que les promenades y sont plus sympa qu’en ville. D’un autre côté, c’est pas comme s’il y avait beaucoup d'autres choses à faire avec internet qui ne fonctionne pas.
Pas très envie de lire, pas de lecteur DVD, j’enfile des chaussures de marche et pars me balader.
Le fond de l’air est froid, ça me gèle le bout du nez et le vent me gifle les joues, mais vraiment ça ne fait pas de mal. Et puis, histoire de lier l’utile à l’agréable, j’en profite pour appeler ma mère, prendre des nouvelles. Avant qu’elle ne me traite d’être un enfant indigne, qui en plus de l’avoir abandonnée pour partir, pfiou, presque au bout du monde, ne se soucie même pas de son état. Drama queen.

Je passe devant la maison du voisin et vais me perdre quelques heures en forêt. J’ai du temps aujourd’hui, et franchement on ne crache pas dessus.
On papote de tout et de rien, parfois ça coupe un peu, mais faut dire que la couverture réseau de la forêt domaniale de la punaise n’a pas franchement de raison d’être meilleure que celle du centre ville qui n’est pas déjà pas ouf.

Elle attend que je sois presque rentré pour aborder un sujet qui fâche.

- Tiens d’ailleurs ma chérie, il y a un ami à toi qui est passé à la maison hier pour prendre de tes nouvelles.

Bah tiens. J’essaie d’en savoir plus, elle est un peu évasive, elle tourne autour du pot. Je me trouve un peu sec quand je lui dis que si j’avais voulu donner des nouvelles à cette personne je lui aurait filé mon numéro avant de partir.

- Il était insistant et ton frère n’était pas à la maison…

Génial, il y a un gars qui est allé faire flipper ma mère pour avoir mes coordonnées… J’essaie de savoir qui c’est, au moins pour avoir une idée de ce à quoi je dois m’attendre, de savoir de la part de qui je risque de recevoir des dickpics.
Elle n’a pas de prénom à me donner, juste une description physique aléatoire qui met un certain temps à monter au cerveau, qui met un certain temps à faire le lien.

- Putain, mais c’est un des gars d’Elvis ça ! Oh non ça craint ! Pourquoi ce trou du cul veut mon numéro ? Il t’a pas dit je paris ?!

Elle se répand en excuses, mortifiée à l’idée qu’Elvis reprenne contact, mais on n’a pas le temps de s’étendre sur le sujet, il y a une jeune femme devant chez moi qui m’alpague dès qu’elle me voit.

- M’man, j’te rappelle plus tard, il semblerait que j’ai de la visite [...] Non rien à voir, t’inquiètes. Bisous à Vic’.

J’ai envie de balancer ce téléphone contre le mur, mais y’a cette nana, très jolie soit dit en passant, avec ce large sourire, qui semble visiblement avoir besoin de quelque chose. Du coup je glisse mon téléphone dans ma poche et réponds à son sourire poliment.

- Bonjour. Oh, monsieur l’infirmier c’est un peu beaucoup non ? Appelez moi Charlie. Et vous êtes ? Je peux vous aider ?

Surement une jeune femme qui veut discuter de soins à donner à un parent.